Entre roches trouées, feu sous la montagne et mer « possédée », les mystères de l’Ouest Var persistent…
Face à la Méditerranée, entre La Seyne-sur-Mer et Six-Fours, se dresse une masse sombre et majestueuse : le massif du Cap Sicié. Un territoire à la géologie tourmentée, façonné par le feu, le vent et le temps. Peu le savent, mais ce paysage spectaculaire garde les traces d’un passé volcanique aujourd’hui méconnu, enveloppé de récits populaires qui continuent d’intriguer.
🌋 Un héritage volcanique enfoui
Le Cap Sicié et la pointe du Cap Nègre sont issus d’un socle rocheux très ancien, formé il y a plusieurs centaines de millions d’années. Ce massif appartient à un ensemble métamorphique et volcanique où l’on retrouve des traces de coulées de lave anciennes, notamment du basalte et de la rhyolite porphyrique. Certaines datations situent ces événements autour du Permien, mais d’autres structures visibles, comme les orgues basaltiques du Cap Nègre, sont plus récentes (probablement du Miocène, soit environ 6 millions d’années¹).
Ces formations géologiques ont produit des rochers sombres, parfois vacuolaires, témoins d’une lave refroidie rapidement, où des bulles de gaz se sont échappées, laissant des cavités dans la pierre.
🪨 Un site géologique remarquable
Le massif est aujourd’hui reconnu comme une zone naturelle d’intérêt géologique, classé en ZNIEFF (zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique). Des orgues volcaniques, colonnes rocheuses formées par le refroidissement lent de la lave, sont encore visibles du côté de la pointe Nègre².
Ces particularités attirent les géologues curieux de décrypter les mouvements tectoniques anciens et les processus d’érosion qui ont façonné le paysage. Le volcan originel n’est plus visible : il a été entièrement érosé ou enfoui, ce qui laisse des zones d’ombre sur la forme exacte de l’activité volcanique passée (volcan unique ou arc multiple ? émergé ou sous-marin ?).
🌊 Une mer instable… ou habitée ?
Au-delà des faits, l’imaginaire maritime local s’est construit sur l’observation de phénomènes naturels impressionnants : courants imprévisibles, vagues puissantes même par temps calme, grottes battues par la houle. Certains anciens pêcheurs évoquaient une « mer vivante », voire « possédée », au pied du Cap.
Des bruits sourds, des vibrations rocheuses ou des remontées de brume marine ont nourri des récits parfois interprétés comme les manifestations d’un feu encore actif sous la montagne. Si la science évoque plutôt des effets de micro-séismes ou de courants marins particuliers, l’imaginaire local, lui, préfère y voir la mémoire d’un volcan endormi.
🧚 Légendes et murmures
Ces terres, minérales et escarpées, ont aussi nourri des légendes varoises transmises de génération en génération :
Le feu sous la montagne : une croyance populaire veut qu’un cœur de chaleur batte encore dans les profondeurs du massif.
Les Deux Frères : deux rochers au large, symboles d’une tragédie amoureuse entre deux pêcheurs tombés amoureux d’une même sirène — ou d’un simple jeu de jalousie.
Le dragon du Cap Nègre : une créature marine fantastique aurait autrefois gardé les falaises, peut-être inspirée par les eaux troublées et les vents imprévisibles.
Et aujourd’hui encore, certains promeneurs affirment ressentir une forme d’énergie étrange au sommet de Notre-Dame du Mai, perchée à 352 m d’altitude, entre vent, silence et vertige.
📍 Une terre vivante
Du sentier côtier du Cap Nègre aux hauteurs de la pointe du Mai, chaque pierre, chaque falaise raconte une histoire. Entre science et intuition, entre tectonique ancienne et contes de pêcheurs, le Cap Sicié reste un lieu d’énigmes à ciel ouvert.
Alors, volcan éteint ou force endormie ? Ici, la terre garde ses secrets aussi bien que la mer.