Une exposition scientifique est à découvrir au Fort Napoléon du 15 septembre au 8 octobre. On y découvre les recherches menées par différents instituts au large des côtes varoises.
« La ville est reliée au cosmos, à l’univers et à ses lois depuis des décennies » commence Nathalie Bicais. Le ton est donné, les portes du Fort Napoléon s’ouvrent sur un univers si étonnant que sans la présence des chercheurs du CNRS sur les lieux, vous pourriez mêler fiction et réalité dans votre esprit en découvrant l’exposition proposée. Les scientifiques sont là pour vulgariser leur savoir et expliquer vingt ans d’exploration du cosmos depuis les abysses de la Méditerranée. Pour comprendre leur labeur, il faut d’abord se plonger dans le monde des particules.

Le neutrino un messager du cosmos.
À chaque seconde, votre corps est traversé par des milliers de milliards de neutrinos sans heurter le moindre noyau de vos atomes. Vous ne ressentez rien. Pour eux, nous sommes comme formés de vide. Cette particule « fantôme » intéresse à la fois la physique quantique, l’astrophysique et la cosmologie. Quand aux neutrinos primitifs, ils sont un graal: des reliques issues du BigBang qui pourraient nous dire à quoi ressemblait la première seconde de l’univers.
Pour les étudier : les abysses, car, quand les neutrinos interagissent avec la matière, ils produisent des particules chargées qu’il est possible de déceler grâce à des sillages lumineux.
C’est donc à 40 km des côtes de la ville et à 2400m de profondeur que le Centre de Physique des Particules de Marseille (CPPM) et l’Institut de Recherche sur les Lois Fondamentales de l’Univers (IRFU) en partenariat avec l’Ifremer et des laboratoires du CRNS et de l’INSU ont déposé en 1996 leur premier télescope à neutrinos. Ce projet nommé ANTARES a été mené par une collaboration internationale regroupant plus de 200 scientifiques issus d’une quinzaine de laboratoires du monde entier.
Les données collectées ont été acheminées par un câble télécoms jusqu’à l’Institut Michel Pacha afin d’être étudiées. Partagées, ces analyses ont permis des avancées significatives dans le monde sur l’origine des rayons cosmiques, entre autres, mais aussi sur les recherches de la Matières Noires.
À l’heure où nous publions, la deuxième génération de détecteur à neutrinos est en train de prendre vie : le KM3Net avec non plus 1 mais 3 capteurs photosensibles par sphères ! Plus incroyable encore, le télescope fonctionne grâce à une plateforme sous-marine qui fournit aux scientifiques du milieu marin des possibilités sans précédent. Il est ainsi possible d’étudier à présent : l’évolution du climat et de la circulation océanique, la faune des abysses, les risques sismiques (…) Pour en savoir plus, foncez au Fort Napoléon.
Les temps forts de l’exposition
L’exposition « Des abysses au Cosmos » a été imaginé dans le but de « sublimer la culture scientifique et technique selon Christelle Lachaud, élue, tout en mettant en avant la pluralité du patrimoine local ». Elle est donc ouverte à tous, y compris aux enfants chez qui on espère voir naître des vocations nouvelles. Des quizz, des ateliers, des visites guidées seront possibles pour les scolaires sur inscriptions des établissements. Pour le grand public, l’exposition sera à découvrir du mardi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 17h, le samedi de 9h à 12h et de 14h à 18h et le dimanche 17 septembre et 8 octobre de 9h à 12h et de 14h à 18h. Les chercheurs du CNRS seront présents pour les journées du patrimoine et lors de la fête de la science. Le reste du temps, des interviews seront diffuseés en boucle sur des écrans. Chaque samedi, une conférence sera proposée sur une thématique particulière à 16h30 et chaque conférence sera précédée d’une visite guidée. Samedi 16, on commencera par ANTARES et KM3NET: 20 ans d’exploration. Le samedi suivant : « Les sciences environnementales » puis « L’histoire des neutrinos » et pour finir le samedi 7 octobre « L’astronomie du 21e siècle ». Inscriptions et informations : com@cppm.in2p3.fr
« La Seyne, terre des sciences »
« La Seyne est le premier port scientifique d’Europe, souligne Madame le maire, Nathalie Bicais, de nombreuses sociétés font de la recherche fondamentale ou appliquée sur notre territoire et toutes collaborent avec le reste du monde. Dans ce projet qui mobilise des chercheurs à l’international, nous avions déjà l’Institut Pacha qui récoltait les données d’ANTARES, bientôt, celles de KM3NET le seront dans le bâtiment en construction à Brégaillon. L’IFREMER construit des robots sous-marins utilisés pour la maintenance des télescopes, et toutes les données sont collectées, rappelons le, grâce à la fibre d’Orange Marine dont l’un des câbles connecte Singapour à la plage des Sablettes. Chez nous, c’est, sous le sable, la technologie si j’ose dire! Cette exposition a été conçu pour dire aux Seynois : « Regardez ce qui se fait chez vous, soyez-fiers! » Je souhaite ajouter, que toutes ces actions sont en train de créer une synergie. Parce que nous sommes une terre des sciences, nous avons vu arriver le nouveau navire câblier d’Orange Marine : le Sophie Germain, cet été. Il sera utilisé pour des missions de maintenance en mer Méditerranée, en mer rouge et en mer noir. Les enfants qui viendront voir cette exposition pourront se dire : c’est à côté, c’est accessible. Et c’est ainsi que nous créons des vocations. »
« Les découvertes sont le fruit d’échanges »
Le docteur Damien Dornic est chercheur au Centre de Physique des Particules de Marseille, a étudié les donnés récoltées par Antares et travaillera également avec la deuxième génération de détecteur à neutrinos, le KM3Net. Lorsqu’on le questionne sur son quotidien, il prévient : « Cela n’a plus rien à voir avec le monde d’avant. N’imaginez pas un chercheur seul dans son bureau en train de faire des calculs avant de s’écrier Eureka. Aujourd’hui, la science a besoin de deux choses pour avancer : de temps, car les découvertes prennent des décennies, et de collaborations. De nos jours, nous partageons énormément et les découvertes sont le fruit de ces échanges. »
La guerre freine la science.
Concernant les neutrinos, il existe trois grandes stations qui collectent des données à leur sujet : l’une est sur nos côtes, la seconde est le fait des Américains et est située au Pôle Sud où l’on officie en observant dans la glace à l’aide du plus grand télescope à neutrinos jamais conçu et la dernière est en Russie dans le lac Baïkal, le plus profond du monde. « De par les événements actuels à savoir la guerre en Ukraine, nous ne correspondons plus avec les Russes. Le dialogue est coupé, c’est ainsi. » Pour rappel, en mars de l’année dernière, le CNRS avait fait un communiqué stipulant suspendre toutes collaborations avec la Russie mais avait précisé que « les chercheurs russes travaillant dans les laboratoire français pouvaient poursuivre leurs activités. »