Au milieu des habitations à Six-Fours, une terre de quatre hectares est préservée du temps et de l’urbanisation. Cela fait près de deux siècles, soit avant même la Révolution Française, que la famille Priolio veille sur ses champs nourriciers. Et lorsque Robert et Karina laisseront le domaine à leur fille Gabrielle, elle sera la douzième générations à prendre soin de la terre familiale.
Quand son père pense à l’avenir, c’est sans crainte : « Dans notre lignée, ce sont les femmes qui ont été terrassés par la maladie ou les guerres. Gabrielle connaît le travail de la terre depuis toujours. Enfant, lorsqu’elle échappait à notre vigilance, c’était pour s’assoir au milieu des champs. Elle sortait le fenouil de terre, inventait des personnages et jouait avec pendant des heures. Je sais que Gabrielle est attachée à cette idée de transmission familiale. La vielle s’est construite autour de nous à travers les âges mais nous avons toujours refusé de céder à l’appel des promoteurs. »
Si le domaine propose aujourd’hui des fruits et des légumes, dans le temps, ce sont les vignes et les fleurs qui y étaient récoltées. Il reprend : « Pour perdurer, il a fallu s’adapter aux modes de consommation et aux habitudes des époques. De nos jours, nous sommes de plus en plus nombreux et il y a de moins en moins de jardins. Plus personne ne cultive son potager. Nôtre rôle c’est de nourrir la population et de protéger la biodiversité tant qu’on le peut. Par exemple afin de sauvegarder la faune, je plante des artichauts chaque année car je sais que c’est le mets préféré de la scolie à front jaune. Et puis on a des oiseaux qui suivent nos habitudes aussi. Un corbeau suit chacun de mes déplacements lorsque je retourne la terre, il sait qu’il pourra manger juste après en fouillant. Gabrielle a un petit rouge-gorge qui la suit partout lorsqu’elle part planter. La terre et ses habitants ont une mémoire. Il faut prendre soin aujourd’hui de notre patrimoine pour les générations futures. »
Ce matin-là, ce sont les poivrons et les aubergines qui sont ramassés à la main dans les champs et amenés jusqu’à l’entrepôt sur le tracteur. Quelques heures plus loin ces récoltes seront vendues sur le domaine ouvert au public pour l’occasion. Robert pense déjà à la prochaine saison. Il raconte : « Quand arrive la fin de l’été, nous attendons toujours les premières pluies pour semer, lorsque la terre argileuse se gorge d’eau.Si les averses tardent venir cette année, alors le calendrier des récoltes sera décalé. C’est ce qui se passe lorsqu’on souhaite travailler en harmonie avec dame nature. Il faut accepter qu’on ne puisse pas tout contrôler. »
Cet article provient du Hors Série Papier n3 du Petit Varois.fr que vous pouvez télécharger gratuitement juste ici : Hors Série N3 Le Petit Varois.fr