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mercredi 23 avril 2025

Dossier : Les pigeons, des animaux domestiqués depuis des siècles, de nos jours des ateliers pour enfants.

À Sanary-sur-Mer, au Cabanon des Vignes plus exactement, un nouvel aménagement et de nouveaux projets sont en train de voir le jour. L’une des nouveautés à découvrir est l’implantation de deux associations qui militent pour le bien être des animaux. L’une d’entre elle est « Les colombes du soleil », dont le thème principal est les pigeons et leur histoire. Rencontre avec ces drôles de passionnés qui proposent plus d’une activité avec ces volatiles.

Les pigeons, des alliés à travers les siècles.

DR

Au premier siècle après Jesus-Christ, Pline l’Ancien écrivait dans son oeuvre magistrale, l’Histoire naturelle : « À quoi servent les remparts et les sentinelles et le blocus, quand on peut faire parvenir des nouvelles à travers l’espace. » Trois millénaires avant ce constat, les égyptiens utilisés les pigeons pour annoncer leur arrivée au port plusieurs jours à l’avance. Les grecs utilisaient ces derniers pour communiquer les résultats des Jeux Olympiques ! En 732, Charles Martel annonça même sa victoire de Poitiers sur les Sarrasins de cette manière. De l’autre part de la Méditerranée et même jusque du coté de la mer rouge, dans le monde arabo-musulman, l’animal est intouchable. Il est cité dans le Coran pour avoir aidé le prophète Mohammed et son fidèle compagnon Abu Bakr à fuir une armée de guerriers fanatisés. Mais alors pourquoi ce désamour contemporain ? Après la Révolution Française, les privilèges des nobles tombent et les paysans peuvent avoir eux aussi leurs propres pigeons. Ils entrent ainsi dans les foyers en nombre. Pendant la première guerre mondiale, 300 000 pigeons participent à l’effort de guerre dont Vaillant, qui sera cité à l’Ordre de la Nation pour avoir accompli sa mission, en pleine bataille de Verdun, au péril de sa vie. Mais voilà. Lorsqu’ils n’ont plus d’utilité public, ils pullulent et bientôt les pouvoirs publics décrètent qu’ils sont nuisibles. On essaie d’en exterminer un grand nombre mais les populations se rebellent. Les pouvoir publics relatent qu’ils causent des maladies, la rumeur prend, le pigeon est désavoué.

Les pigeons sont des compagnons fidèles. Rencontre avec l’association « Les Colombes du Soleil ». 

Jean-Pierre Bourgon était un jeune enfant lorsqu’il a rencontré pour la première fois un colombophile qui lui a transmis « la passion d’une vie ». Il résidait alors à Lille et le père de son copain n’avait de cesse de faire les cent pas dans le jardin. « Croyez-le ou non mais il avait lâché son pigeon à Marseille quelques jours auparavant et avait calculé que l’animal arriverait dans l’après-midi. Quelques minutes plus loin, une tâche apparaissait dans le ciel. Il avait traversé la France sans faillir, j’étais complètement subjugué. » 

Depuis Jean-Pierre a fait du chemin. Dans son jardin, l’homme possède une bonne centaine de volatiles, quasiment tous sont en liberté, sauf les souffrants qui bénéficient de soins ou les espèces façonnées par la main de l’homme qui ne peuvent plus voler et donc échapper aux prédateurs comme les « Pigeons de Chair » qui font la taille d’une poule. « Il y a plus de 450 espèces de pigeons à présent. Les hommes ont fait des croisements en fonction des besoins. Les plus gros ont souvent servi de repas. » Quant-à ceux qui sont en liberté, aucune crainte de fuite. « Ce sont des compagnons fidèles. Certains sont là pour la nourriture, d’autres parce qu’ils sont en couple et restent avec leur moitié et certains ne quittent pas les lieux par affection. La dernière fois que je suis parti en vacances, j’ai dû revenir de toute urgence car ma chouchou se laissait mourir. Résultat, elle a fait une semaine de cure avec moi. »

Si Jean-Pierre a un quotidien chargé avec ses animaux, ces derniers l’assistent également dans sa vie professionnelle. Il fait des événements publics avec, comme par exemple des mariages. « Lorsque les pigeons sortent du nid pour la première fois, ils enregistrent les données de leur lieu de naissance comme on le ferait avec un GPS. Donc si l’endroit les satisfait, ils reviendront toujours. Il m’arrive de faire des mariages, de laisser s’échapper une cinquantaine d’oiseaux dans le ciel et de rentrer chez moi avec mes cages vides. Et ils m’attendent dans le jardin, perchés sur une branche. Ils sont libres de me quitter mais ne le font pas. » 

Et si le colombophile prend le temps de la discussion à chaque nouvelle rencontre, c’est qu’il rêve de faire changer le regard que porte les gens sur ces volatiles. « On les accuse à tord de tous les maux. Ces animaux ont servi à toutes les grandes civilisations. Ils étaient même vénérés au temps des pharaons. Et puis dans les années 60, les autorités ont décidé qu’il y en avait trop. On a mis en place des grandes campagnes pour les éradiquer. Les villageois se sont rebellés, alors on a fait courir le bruit qu’ils étaient sales, et porteurs de maladies. La rumeur s’est répandue et aujourd’hui encore on craint ces oiseaux injustement. » 

Des ateliers pédagogiques avec les pigeons pour les enfants. 

Dans le jardin de Christian Gaine, un grand pigeonnier pédagogique. L’homme qui est un ami de Jean-Pierre Brignon a rejoint son association « Les colombes du soleil » il y a de cela plusieurs années. Un beau jour, ensemble, ils ont une idée. Ils vont construire un lieu de rencontre entre les pigeons et les enfants. Depuis, une cinquantaine d’oiseaux vivent dans le jardin de Christian Gaine, dans un pigeonnier. Une fois par jour, ce dernier ouvre les portes de la liberté aux volatiles qui partent se dégourdir les ailes dans le ciel. Ils tourbillonnent autour de la maison pendant de longs instants avant de venir se poser sur le toit quand le coeur leur en dit. Quand l’homme souhaite faire rentrer les volatiles, un coup de sifflet suffit.

« Ils savent que c’est l’heure de la nourriture alors personne ne traine. Voir des oiseaux domestiqués de la sorte et habitués à la présence humaine fascine toujours les visiteurs. » Un samedi par mois, Christian ouvre les portes de sa maison au public. Les enfants peuvent assister au spectacle mais aussi nouer des liens avec un pigeonneau. « On apprend les bases à l’enfant, comment tenir l’animal sans le blesser. Le volatile se fait à sa présence et un jour l’enfant repart avec. Il se sent responsabilisé, et est fier de son nouvel ami. Il peut le présenter à ses copains à sa famille. Puis il ouvre la fenêtre, et le pigeon rentre chez lui. C’est ce qu’on a appelé le parrainage. » Si la méthode séduit, les enfants comme les adultes peuvent également venir assister à des scènes de vie en contemplant le pigeonnier. Des bébés prennent la becquée, pendant que d’autres, plus grands et un peu feignants se font montrer le bol de graines par des parents épuisés. À découvrir.

Quelles solutions pour les pouvoirs publics ?

Si les pigeons en trop grand nombre ont tendance à créer des nuisances,  ces derniers bénéficient d’un statut particulier en France : celui « d’animal domestique sans propriétaire ». Légalement, Impossible alors pour tout à chacun de décider d’ôter la vie à une colonie. Seul l’arrêté d’un maire, dans le cadre de ses pouvoirs de police peut mettre en place des moyens de lutte de prolifération.

Martine Pacaud est juriste en droit animal et met en place des pigeonniers contraceptifs afin de réguler la population de ces animaux, sans heurts. Elle raconte : « La nature n’aime pas le vide. Si l’homme venait à éradiquer les pigeons, d’autres espèces prendraient leur place. Les pigeons sont domésticables et se nourrissent des déchets de l’homme et de graines. Les corneilles, elles, sont omnivores, sans les pigeons, elles pulluleraient et seraient un danger pour la biodiversité par exemple. Il faut donc agir intelligemment. »

Connaissant l’animal comme personne, elle propose après une étude sur le terrain les solutions les plus adaptées aux communes. « En France, on manque de méthode. Il faut contrôler les colonies. Lorsqu’il y a un pigeonnier, il faut passer tous les deux jours pour nourrir les bêtes, par exemple, pour être certaines qu’elles nichent bien là. Et ensuite, on retire leurs oeufs et on en place des faux. Si vous passez une fois tous les 15j jeter des graines, les pigeons seront au rendez-vous à ce moment là, mais iront vivre ailleurs. Vous n’aurez alors aucun moyen de contrôler les naissances. » 

 

 

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Dossier : Les pigeons, des animaux domestiqués depuis des siècles, de nos jours des ateliers pour enfants.

À Sanary-sur-Mer, au Cabanon des Vignes plus exactement, un nouvel aménagement et de nouveaux projets sont en train de voir le jour. L’une des nouveautés à découvrir est l’implantation de deux associations qui militent pour le bien être des animaux. L’une d’entre elle est « Les colombes du soleil », dont le thème principal est les pigeons et leur histoire. Rencontre avec ces drôles de passionnés qui proposent plus d’une activité avec ces volatiles.

Les pigeons, des alliés à travers les siècles.

DR

Au premier siècle après Jesus-Christ, Pline l’Ancien écrivait dans son oeuvre magistrale, l’Histoire naturelle : « À quoi servent les remparts et les sentinelles et le blocus, quand on peut faire parvenir des nouvelles à travers l’espace. » Trois millénaires avant ce constat, les égyptiens utilisés les pigeons pour annoncer leur arrivée au port plusieurs jours à l’avance. Les grecs utilisaient ces derniers pour communiquer les résultats des Jeux Olympiques ! En 732, Charles Martel annonça même sa victoire de Poitiers sur les Sarrasins de cette manière. De l’autre part de la Méditerranée et même jusque du coté de la mer rouge, dans le monde arabo-musulman, l’animal est intouchable. Il est cité dans le Coran pour avoir aidé le prophète Mohammed et son fidèle compagnon Abu Bakr à fuir une armée de guerriers fanatisés. Mais alors pourquoi ce désamour contemporain ? Après la Révolution Française, les privilèges des nobles tombent et les paysans peuvent avoir eux aussi leurs propres pigeons. Ils entrent ainsi dans les foyers en nombre. Pendant la première guerre mondiale, 300 000 pigeons participent à l’effort de guerre dont Vaillant, qui sera cité à l’Ordre de la Nation pour avoir accompli sa mission, en pleine bataille de Verdun, au péril de sa vie. Mais voilà. Lorsqu’ils n’ont plus d’utilité public, ils pullulent et bientôt les pouvoirs publics décrètent qu’ils sont nuisibles. On essaie d’en exterminer un grand nombre mais les populations se rebellent. Les pouvoir publics relatent qu’ils causent des maladies, la rumeur prend, le pigeon est désavoué.

Les pigeons sont des compagnons fidèles. Rencontre avec l’association « Les Colombes du Soleil ». 

Jean-Pierre Bourgon était un jeune enfant lorsqu’il a rencontré pour la première fois un colombophile qui lui a transmis « la passion d’une vie ». Il résidait alors à Lille et le père de son copain n’avait de cesse de faire les cent pas dans le jardin. « Croyez-le ou non mais il avait lâché son pigeon à Marseille quelques jours auparavant et avait calculé que l’animal arriverait dans l’après-midi. Quelques minutes plus loin, une tâche apparaissait dans le ciel. Il avait traversé la France sans faillir, j’étais complètement subjugué. » 

Depuis Jean-Pierre a fait du chemin. Dans son jardin, l’homme possède une bonne centaine de volatiles, quasiment tous sont en liberté, sauf les souffrants qui bénéficient de soins ou les espèces façonnées par la main de l’homme qui ne peuvent plus voler et donc échapper aux prédateurs comme les « Pigeons de Chair » qui font la taille d’une poule. « Il y a plus de 450 espèces de pigeons à présent. Les hommes ont fait des croisements en fonction des besoins. Les plus gros ont souvent servi de repas. » Quant-à ceux qui sont en liberté, aucune crainte de fuite. « Ce sont des compagnons fidèles. Certains sont là pour la nourriture, d’autres parce qu’ils sont en couple et restent avec leur moitié et certains ne quittent pas les lieux par affection. La dernière fois que je suis parti en vacances, j’ai dû revenir de toute urgence car ma chouchou se laissait mourir. Résultat, elle a fait une semaine de cure avec moi. »

Si Jean-Pierre a un quotidien chargé avec ses animaux, ces derniers l’assistent également dans sa vie professionnelle. Il fait des événements publics avec, comme par exemple des mariages. « Lorsque les pigeons sortent du nid pour la première fois, ils enregistrent les données de leur lieu de naissance comme on le ferait avec un GPS. Donc si l’endroit les satisfait, ils reviendront toujours. Il m’arrive de faire des mariages, de laisser s’échapper une cinquantaine d’oiseaux dans le ciel et de rentrer chez moi avec mes cages vides. Et ils m’attendent dans le jardin, perchés sur une branche. Ils sont libres de me quitter mais ne le font pas. » 

Et si le colombophile prend le temps de la discussion à chaque nouvelle rencontre, c’est qu’il rêve de faire changer le regard que porte les gens sur ces volatiles. « On les accuse à tord de tous les maux. Ces animaux ont servi à toutes les grandes civilisations. Ils étaient même vénérés au temps des pharaons. Et puis dans les années 60, les autorités ont décidé qu’il y en avait trop. On a mis en place des grandes campagnes pour les éradiquer. Les villageois se sont rebellés, alors on a fait courir le bruit qu’ils étaient sales, et porteurs de maladies. La rumeur s’est répandue et aujourd’hui encore on craint ces oiseaux injustement. » 

Des ateliers pédagogiques avec les pigeons pour les enfants. 

Dans le jardin de Christian Gaine, un grand pigeonnier pédagogique. L’homme qui est un ami de Jean-Pierre Brignon a rejoint son association « Les colombes du soleil » il y a de cela plusieurs années. Un beau jour, ensemble, ils ont une idée. Ils vont construire un lieu de rencontre entre les pigeons et les enfants. Depuis, une cinquantaine d’oiseaux vivent dans le jardin de Christian Gaine, dans un pigeonnier. Une fois par jour, ce dernier ouvre les portes de la liberté aux volatiles qui partent se dégourdir les ailes dans le ciel. Ils tourbillonnent autour de la maison pendant de longs instants avant de venir se poser sur le toit quand le coeur leur en dit. Quand l’homme souhaite faire rentrer les volatiles, un coup de sifflet suffit.

« Ils savent que c’est l’heure de la nourriture alors personne ne traine. Voir des oiseaux domestiqués de la sorte et habitués à la présence humaine fascine toujours les visiteurs. » Un samedi par mois, Christian ouvre les portes de sa maison au public. Les enfants peuvent assister au spectacle mais aussi nouer des liens avec un pigeonneau. « On apprend les bases à l’enfant, comment tenir l’animal sans le blesser. Le volatile se fait à sa présence et un jour l’enfant repart avec. Il se sent responsabilisé, et est fier de son nouvel ami. Il peut le présenter à ses copains à sa famille. Puis il ouvre la fenêtre, et le pigeon rentre chez lui. C’est ce qu’on a appelé le parrainage. » Si la méthode séduit, les enfants comme les adultes peuvent également venir assister à des scènes de vie en contemplant le pigeonnier. Des bébés prennent la becquée, pendant que d’autres, plus grands et un peu feignants se font montrer le bol de graines par des parents épuisés. À découvrir.

Quelles solutions pour les pouvoirs publics ?

Si les pigeons en trop grand nombre ont tendance à créer des nuisances,  ces derniers bénéficient d’un statut particulier en France : celui « d’animal domestique sans propriétaire ». Légalement, Impossible alors pour tout à chacun de décider d’ôter la vie à une colonie. Seul l’arrêté d’un maire, dans le cadre de ses pouvoirs de police peut mettre en place des moyens de lutte de prolifération.

Martine Pacaud est juriste en droit animal et met en place des pigeonniers contraceptifs afin de réguler la population de ces animaux, sans heurts. Elle raconte : « La nature n’aime pas le vide. Si l’homme venait à éradiquer les pigeons, d’autres espèces prendraient leur place. Les pigeons sont domésticables et se nourrissent des déchets de l’homme et de graines. Les corneilles, elles, sont omnivores, sans les pigeons, elles pulluleraient et seraient un danger pour la biodiversité par exemple. Il faut donc agir intelligemment. »

Connaissant l’animal comme personne, elle propose après une étude sur le terrain les solutions les plus adaptées aux communes. « En France, on manque de méthode. Il faut contrôler les colonies. Lorsqu’il y a un pigeonnier, il faut passer tous les deux jours pour nourrir les bêtes, par exemple, pour être certaines qu’elles nichent bien là. Et ensuite, on retire leurs oeufs et on en place des faux. Si vous passez une fois tous les 15j jeter des graines, les pigeons seront au rendez-vous à ce moment là, mais iront vivre ailleurs. Vous n’aurez alors aucun moyen de contrôler les naissances. » 

 

 

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Les pigeons, des alliés à travers les siècles.

DR

Au premier siècle après Jesus-Christ, Pline l’Ancien écrivait dans son oeuvre magistrale, l’Histoire naturelle : « À quoi servent les remparts et les sentinelles et le blocus, quand on peut faire parvenir des nouvelles à travers l’espace. » Trois millénaires avant ce constat, les égyptiens utilisés les pigeons pour annoncer leur arrivée au port plusieurs jours à l’avance. Les grecs utilisaient ces derniers pour communiquer les résultats des Jeux Olympiques ! En 732, Charles Martel annonça même sa victoire de Poitiers sur les Sarrasins de cette manière. De l’autre part de la Méditerranée et même jusque du coté de la mer rouge, dans le monde arabo-musulman, l’animal est intouchable. Il est cité dans le Coran pour avoir aidé le prophète Mohammed et son fidèle compagnon Abu Bakr à fuir une armée de guerriers fanatisés. Mais alors pourquoi ce désamour contemporain ? Après la Révolution Française, les privilèges des nobles tombent et les paysans peuvent avoir eux aussi leurs propres pigeons. Ils entrent ainsi dans les foyers en nombre. Pendant la première guerre mondiale, 300 000 pigeons participent à l’effort de guerre dont Vaillant, qui sera cité à l’Ordre de la Nation pour avoir accompli sa mission, en pleine bataille de Verdun, au péril de sa vie. Mais voilà. Lorsqu’ils n’ont plus d’utilité public, ils pullulent et bientôt les pouvoirs publics décrètent qu’ils sont nuisibles. On essaie d’en exterminer un grand nombre mais les populations se rebellent. Les pouvoir publics relatent qu’ils causent des maladies, la rumeur prend, le pigeon est désavoué.

Les pigeons sont des compagnons fidèles. Rencontre avec l’association « Les Colombes du Soleil ». 

Jean-Pierre Bourgon était un jeune enfant lorsqu’il a rencontré pour la première fois un colombophile qui lui a transmis « la passion d’une vie ». Il résidait alors à Lille et le père de son copain n’avait de cesse de faire les cent pas dans le jardin. « Croyez-le ou non mais il avait lâché son pigeon à Marseille quelques jours auparavant et avait calculé que l’animal arriverait dans l’après-midi. Quelques minutes plus loin, une tâche apparaissait dans le ciel. Il avait traversé la France sans faillir, j’étais complètement subjugué. » 

Depuis Jean-Pierre a fait du chemin. Dans son jardin, l’homme possède une bonne centaine de volatiles, quasiment tous sont en liberté, sauf les souffrants qui bénéficient de soins ou les espèces façonnées par la main de l’homme qui ne peuvent plus voler et donc échapper aux prédateurs comme les « Pigeons de Chair » qui font la taille d’une poule. « Il y a plus de 450 espèces de pigeons à présent. Les hommes ont fait des croisements en fonction des besoins. Les plus gros ont souvent servi de repas. » Quant-à ceux qui sont en liberté, aucune crainte de fuite. « Ce sont des compagnons fidèles. Certains sont là pour la nourriture, d’autres parce qu’ils sont en couple et restent avec leur moitié et certains ne quittent pas les lieux par affection. La dernière fois que je suis parti en vacances, j’ai dû revenir de toute urgence car ma chouchou se laissait mourir. Résultat, elle a fait une semaine de cure avec moi. »

Si Jean-Pierre a un quotidien chargé avec ses animaux, ces derniers l’assistent également dans sa vie professionnelle. Il fait des événements publics avec, comme par exemple des mariages. « Lorsque les pigeons sortent du nid pour la première fois, ils enregistrent les données de leur lieu de naissance comme on le ferait avec un GPS. Donc si l’endroit les satisfait, ils reviendront toujours. Il m’arrive de faire des mariages, de laisser s’échapper une cinquantaine d’oiseaux dans le ciel et de rentrer chez moi avec mes cages vides. Et ils m’attendent dans le jardin, perchés sur une branche. Ils sont libres de me quitter mais ne le font pas. » 

Et si le colombophile prend le temps de la discussion à chaque nouvelle rencontre, c’est qu’il rêve de faire changer le regard que porte les gens sur ces volatiles. « On les accuse à tord de tous les maux. Ces animaux ont servi à toutes les grandes civilisations. Ils étaient même vénérés au temps des pharaons. Et puis dans les années 60, les autorités ont décidé qu’il y en avait trop. On a mis en place des grandes campagnes pour les éradiquer. Les villageois se sont rebellés, alors on a fait courir le bruit qu’ils étaient sales, et porteurs de maladies. La rumeur s’est répandue et aujourd’hui encore on craint ces oiseaux injustement. » 

Des ateliers pédagogiques avec les pigeons pour les enfants. 

Dans le jardin de Christian Gaine, un grand pigeonnier pédagogique. L’homme qui est un ami de Jean-Pierre Brignon a rejoint son association « Les colombes du soleil » il y a de cela plusieurs années. Un beau jour, ensemble, ils ont une idée. Ils vont construire un lieu de rencontre entre les pigeons et les enfants. Depuis, une cinquantaine d’oiseaux vivent dans le jardin de Christian Gaine, dans un pigeonnier. Une fois par jour, ce dernier ouvre les portes de la liberté aux volatiles qui partent se dégourdir les ailes dans le ciel. Ils tourbillonnent autour de la maison pendant de longs instants avant de venir se poser sur le toit quand le coeur leur en dit. Quand l’homme souhaite faire rentrer les volatiles, un coup de sifflet suffit.

« Ils savent que c’est l’heure de la nourriture alors personne ne traine. Voir des oiseaux domestiqués de la sorte et habitués à la présence humaine fascine toujours les visiteurs. » Un samedi par mois, Christian ouvre les portes de sa maison au public. Les enfants peuvent assister au spectacle mais aussi nouer des liens avec un pigeonneau. « On apprend les bases à l’enfant, comment tenir l’animal sans le blesser. Le volatile se fait à sa présence et un jour l’enfant repart avec. Il se sent responsabilisé, et est fier de son nouvel ami. Il peut le présenter à ses copains à sa famille. Puis il ouvre la fenêtre, et le pigeon rentre chez lui. C’est ce qu’on a appelé le parrainage. » Si la méthode séduit, les enfants comme les adultes peuvent également venir assister à des scènes de vie en contemplant le pigeonnier. Des bébés prennent la becquée, pendant que d’autres, plus grands et un peu feignants se font montrer le bol de graines par des parents épuisés. À découvrir.

Quelles solutions pour les pouvoirs publics ?

Si les pigeons en trop grand nombre ont tendance à créer des nuisances,  ces derniers bénéficient d’un statut particulier en France : celui « d’animal domestique sans propriétaire ». Légalement, Impossible alors pour tout à chacun de décider d’ôter la vie à une colonie. Seul l’arrêté d’un maire, dans le cadre de ses pouvoirs de police peut mettre en place des moyens de lutte de prolifération.

Martine Pacaud est juriste en droit animal et met en place des pigeonniers contraceptifs afin de réguler la population de ces animaux, sans heurts. Elle raconte : « La nature n’aime pas le vide. Si l’homme venait à éradiquer les pigeons, d’autres espèces prendraient leur place. Les pigeons sont domésticables et se nourrissent des déchets de l’homme et de graines. Les corneilles, elles, sont omnivores, sans les pigeons, elles pulluleraient et seraient un danger pour la biodiversité par exemple. Il faut donc agir intelligemment. »

Connaissant l’animal comme personne, elle propose après une étude sur le terrain les solutions les plus adaptées aux communes. « En France, on manque de méthode. Il faut contrôler les colonies. Lorsqu’il y a un pigeonnier, il faut passer tous les deux jours pour nourrir les bêtes, par exemple, pour être certaines qu’elles nichent bien là. Et ensuite, on retire leurs oeufs et on en place des faux. Si vous passez une fois tous les 15j jeter des graines, les pigeons seront au rendez-vous à ce moment là, mais iront vivre ailleurs. Vous n’aurez alors aucun moyen de contrôler les naissances. » 

 

 

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