C’est l’histoire d’une guerre qui se refusera, jusqu’à tard, à dire son nom et qui emportera pourtant sur son passage près de 400 000 âmes.
Quelques années après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le processus de décolonisation débute en Afrique. Le Maroc qui était alors sous protectorat obtient son indépendance en 1956. De l’autre côté du désert, en Algérie française, la colère commence à gronder. Le 1er novembre 1954, date qui restera dans les mémoires sous le nom de « La Toussaint Rouge », soixante-dix attentats sont commis, par le Front de Libération Nationale (FLN) sur le territoire. Un appel à l’indépendance est lancé sur les ondes. La guerre débute, la France mobilisera en 8 ans 1,5 millions d’appelés du contingent. Ainsi, les hommes qui entraient dans l’âge adulte se voyaient envoyer faire leur classe et « apprendre la discipline » avant de traverser la Méditerranée, aux côtés des militaires de métier, pour aider au « maintien de l’ordre » où à « la pacification » de la colonie.
« On était jeunes et insouciants, explique Gérard Allibert, président de la Fédération Nationale des Anciens Combattants en Algérie, Maroc et Tunisie de Six-Fours (la FNACA). Du jour au lendemain nous étions mobilisés pour 18 mois officiellement puis on nous retenait 10 de plus. Il fallait alors mettre sa vie au service du pays, prendre les armes et vivre une guerre qu’on nous assurait ne pas exister. »
Et si le conflit n’est pas avéré, les droits des anciens combattants sont inexistants.
« C’est pour cette raison que la FNACA a vu le jour. Afin d’obtenir la reconnaissance qui nous était dû. En 1974, le mouvement national a permis d’obtenir la carte du combattant aux anciens d’Afrique du Nord ainsi que la reconnaissance officielle de la guerre en 1999. » Président d’un club qui comptabilise aujourd’hui encore 300 adhérents, Gérard sait que l’association est vouée à disparaitre. « Nous avons en moyenne 80 ans, petit à petit, les membres sont emportés. Nous avons aujourd’hui des veuves qui viennent encore à nos actions ou « des amis de » qui souhaitent représenter les défunts, mais cela ne durera pas éternellement et le temps fera son office. »
« Les noms des morts s’invitent parfois … comme une bonne surprise. »
Pour le moment, soixante ans après les faits, les souvenirs restent intacts et continuent de s’échanger. Les noms des morts apparaissent parfois comme une bonne surprise. « Nous faisons des voyages, des repas, des petits événements qui nous rassemblent. Un jour, alors que je dinais en Espagne avec le membre d’un autre club, il m’a parlé d’un de ses amis. J’avais combattu avec lui, et ce dernier était mort pendant une des opérations à laquelle j’avais participé. Nous avons échangé à son sujet pendant un long moment. Il était parmi nous. »
Quelques unes de presse au lendemain du 1er novembre 1954.