Christophe Gaddifert de Brétigny est un aristocrate dont la famille possède ses lettres de patente. Propriétaire de l’établissement L’atelier du Vigneron qui n’a pas son pareil, il côtoie souvent des têtes couronnées, des contes et des duchesses mais ne cesse jamais de répéter ce vieil adage que son père lui confiait lorsqu’il était enfant : « Rien ne sert les titres, s’il n’y a pas la noblesse de coeur. » Alors lorsqu’il rencontre André Tunck, responsable des restos du coeur de la Seyne lors d’une collecte, les deux hommes se mettent d’accord sur une opération pour Noël. Le temps d’un repas, le restaurant de l’aristocrate sera privatisé pour les nécessiteux qui pourront déguster à loisir du foie gras brioche, du poulet cocotte et une forêt noire, le tout accompagné de vin et de champagne. « Une première dans le var » se félicite le responsable.
« La misère et la solitude sont grandissantes. »
Christian Lépine, en charge de la communication des Restos du Coeur de l’antenne locale, conte une situation qui se dégrade : « Cette période est très compliquée car depuis le Covid les dons sont en baisse et les accueillis de plus en plus nombreux. Ajoutez à cela que le prix des marchandises a augmenté de 15% en moyenne sur le territoire français. Tous les signaux sont au rouge. À l’échelle nationale, 47% des personnes que nous accueillons souffrent en plus de solitude, les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses. Un autre chiffre effrayant, 65% des personnes qui viennent au Restos du coeur, vivent avec moins que le minimum vital qui est de 600€. »
« Un accident de vie et tout s’enfuit. »
Monique, Isabelle et Germaine* sont élégantes, ont des perles au cou et les ongles vernis. Soignées, rien ne trahis leur situation. L’une explique : « Je préférais ne pas manger au début plutôt que d’aller au Restos du coeur. Il y a l’idée qu’on dégringole. J’ai perdu mon mari et les choses sont allées de plus en plus mal. » Une autre poursuit : « J’ai travaillé pendant 45 ans, j’ai trébuché a un moment et soudainement, je n’ai plus que 800€ par mois pour vivre et la société souhaite me faire porter une faute, me culpabiliser. » Germaine, elle, cache sa situation de peur de perdre « encore plus d’amis ». « Même aller chez le médecin avec la CMU peut-être humiliant selon la personne que vous avez en face de vous. Quand vous n’avez plus de ressources, on vous déshumanise. C’est pour cette raison que cet événement est important aujourd’hui. On nous traite comme des humains, on nous sert, on nous considère. Mon fils est décédé et je n’ai plus de mari. Je vais fêter Noël seule, alors aujourd’hui je profite. Je ne peux être que reconnaissante. »
* Les noms ont été changés à la demande des intéressées.