9.6 C
Toulon
dimanche 9 février 2025

Une grande soirée au six n’étoiles pour aller à la rencontre de Felix Mayol

Qui était Félix Mayol ? 

On dit qu’Edith Piaf s’était inspirée de ses mimiques pour façonner les siennes avant de monter sur scène. Charlie Chaplin, à peine débarqué à Paris confiait à un journaliste son envie d’aller assister à une représentation du chanteur. Marcel Proust, lui même, raconta à un ami qu’il pourrait donner beaucoup d’argent pour voir l’artiste à la houpette célèbre chanter et danser dans son salon. Mais qui est donc l’homme, internationalement connu, qui donne son nom au vélodrome de Toulon? Un enfant prodige du siècle dernier. Orphelin de bonnes heures, ce passionné, né dans le quartier du Pont-du-las, que l’on souhaitait empêcher de chanter s’est construit sur scène envers et contre tous. En 1886, il connait son premier grand succès avec « La Paimpolaise » mais sa carrière décolle vraiment en 1902 avec la chanson « Viens Poupoule ». Son succès est phénoménale, il se produit dans toute la France et même au-delà. Celui qui confie sans ses mémoires avoir créé près d’un demi millier de chansons, rachète en 1910 le « Concert Parisien » pour en faire « Le Concert Mayol ». Il aide à lancer la carrière de Valentin Sardou (père de Fernand et grand-p!re de Michel Sardou), Maurice Chevalier, Raimu (…). Quand éclate la première guerre mondiale, il s’enquiert à relever le moral des troupes avec des visites et des représentations. Dans sa villa, il recueille même des convalescents. Généreux jusqu’au bout, il offre aux Toulonnais un stade qui porte encore son nom. Après une vie de paillettes mais le coeur restait populaire, il s’éteint en 1941 dans sa ville de naissance.

Un ciné-guinguette pour Mayol au six n’étoiles

La soirée promet d’être à la fois élégante, nichée dans le passée, en plein dans les années de « La Belle époque » et en même temps renversante avec un groupe de musique venue faire vibrer les spectateurs. Dimanche 29 janvier, au Six n’étoiles, les arts vont se répondre pour faire renaître le temps d’une soirée, notre vedette toulonnaise internationale.

Ce mélange des genres ne doit rien au hasard. Il est le fruit d’un labeur, celui de Luc Benito, réalisateur du film « Felix et Moi ». Pour conclure son « Road Movie » qui nous entraine sur les traces du chanteur célèbre, l’homme avait un groupe en tête : Le Guinguette Hot Club. Il souhaitait que ces musiciens issus de la même ville que son personnage puissent composer la musique de générique de fin. Julien Ripoll, membre du collectif explique : « Nous avons été touchés par l’aspect patrimonial du sujet, ce qui nous intéressait, c’était le fait que le chanteur soit Toulonnais et que l’on puisse explorer un large répertoire de la chanson française. Dans un second temps, c’est vraiment le côté artistique qui nous a rattrapé, les textes plus que la musique. Nous avons fait en sorte de nous approprier le répertoire, et au lieu d’une musique, c’est un album entier que nous avons réalisé. » Ce qui a permis également aux artistes de se rendre compte de ce qu’il reste de Mayol dans la région. « Certaines mélodies sont inscrites dans l’inconscient collectif. On lance un son, une parole, et la foule se met à danser et chanter  dans les bars. » À découvrir !

La jeunesse découvre une vedette du siècle dernier

« Qui a déjà entendu parler de Félix Mayol ? » Sur plus d’une soixantaine d’élèves présents dans la salle, une poignée d’entre eux seulement lève la main. Un rugbyman, un écrivain, un chansonnier …  rares sont ceux qui tombent juste. Les lumières s’éteignent et les élèves partent à la découverte d’un enfant de fin de siècle, avant la première guerre mondiale. Sur grand écran, ils vivent les péripéties d’une vie, dansent sur des airs de cabarets, et applaudissent à tout rompre une fois le générique de fin déroulé.

Dans la salle, le réalisateur a profité de la pénombre pour se glisser parmi le public, il veut « ressentir l’ambiance ». Luc Benito prend place sur le devant de la scène et tout de suite la parole se libère. Les élèves ont entre 13 et 14 ans et font partie de la section patrimoine du collège Font de Fillol. Chaque année, ils étudient, en plus du passée, la question de la transmission, ce qui les rend peut-être un plus aguerris que la moyenne. Ils veulent savoir tout de suite : « Comment peut-on se procurer des archives ? », « Combien coûte la fabrication d’un documentaire ? », « Pour les reconstitutions, comment avez-vous trouvé les costumes? ». Petit à petit, la pudeur s’envole et les questions deviennent plus intimes. « Si Felix Mayol était homosexuel, pourquoi était-il toujours accompagné d’une femme sur les vidéos d’archives? » « Est-ce qu’il a fini par être accepté par sa famille? » Pendant une heure et demi, le réalisateur va essayé d’offrir le plus de réponses possible.

Les archives s’achètent. Il le sait bien, puisque contrairement à ce qu’il est coutume de faire, il n’est pas passé par un producteur pour créer le long métrage. Il a utilisé ses fonds personnels soit 55 000€ pour répondre à la seconde question.

« Mais en moyenne, pour un petit documentaire, il faut débourser 400 000€. J’ai fait des choix pour que le film puisse aboutir, mais j’ai payé tout le monde. Je n’ai accepté aucun bénévolat. » Pour les costumes, l’homme s’est appuyé sur des associations. « Des passionnés sont venus jusque du Vaucluse et des Hautes Alpes pour le jour de tournage au théâtre liberté. C’est pour cette raison que la réalisation d’un tel projet prend autant de temps. Trois à quatre ans pour concevoir la chose et trois semaines seulement pour tourner. » Quand à Felix Mayol, il a emporté avec lui bien des secrets malgré ses mémoires composées. « Etait-il vraiment homosexuel ou était-ce des rumeurs dû à ses manières ? Sur scène, il jouait un rôle, mimait souvent les dames. La question reste ouverte mais il semble que la chose soit avérée. La femme qui l’accompagnait dans la vidéo est une autre artiste. » Pour sa famille, « disons que le succès à certainement dû arranger les choses. »

« Mayol a encore des choses à nous apprendre »

Luc Benito n’est pas un réalisateur comme les autres, et pour cause. Avant la sortie de « Felix et Moi », il ne l’était pas du tout. C’est en découvrant les mémoires de l’interprète de « Viens Poupoule » qu’un lien se créé, inexplicablement, avec son aîné de plus d’un siècle. Il se met alors en quête d’archives et de reliques. Une idée née dans son esprit, il va créer un film.

« Je ne savais pas ce que je voulais faire, prévient l’homme, j’avais simplement une idée de ce que je ne voulais pas. Il ne fallait pas que ce soit un documentaire « Wikipédia » comme on dit dans le jargon, avec une date de naissance et de mort. Pour un personnage oublié, il fallait impérativement créer du lien, faire en sorte que le spectateur s’identifie. J’ai donc monté cela comme un road movie. J’embarque les gens avec moi. On suit les traces de celui qui s’est effacé de nos mémoires. » 

S’il ne doute pas, une fois la graine germée dans son esprit, il souhaite faire les choses comme il faut. Il multiplie donc les formations techniques et les résidences pour apprendre à écrire un récit, monter un film. Reste le problème de l’argent. Sans producteur, comment financer ?

Soit, il puisera dans ses deniers personnels. « Felix Mayol s’est imposé à moi. Je crois qu’on l’a oublié et qu’on eu tord. Il a encore des choses à dire sur nous, sur notre société. Quand j’ai pesé le pour et le contre, je me suis dis, si je ne le fait pas maintenant … qui le fera ? » Comme « certain s’achète un SUV », lui s’offre, entre autres, les services d’une poignée d’acteurs dont Charles Berling et François Morel. Un cadeau à la postérité. Le film est entrainant, une troupe de chanteurs toulonnais vient ponctuer le voyage littéraire avec des textes et des mélodies de l’artiste revisités. On s’attendrit, on rit, on découvre et on s’amuse. « On dépoussière le genre du documentaire » fera remarquer la directrice de cinéma qui le reçoit en ce jour. Pari réussi, à découvrir.

spot_img

Nos derniers articles

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_img
spot_img
spot_img

Une grande soirée au six n’étoiles pour aller à la rencontre de Felix Mayol

Qui était Félix Mayol ? 

On dit qu’Edith Piaf s’était inspirée de ses mimiques pour façonner les siennes avant de monter sur scène. Charlie Chaplin, à peine débarqué à Paris confiait à un journaliste son envie d’aller assister à une représentation du chanteur. Marcel Proust, lui même, raconta à un ami qu’il pourrait donner beaucoup d’argent pour voir l’artiste à la houpette célèbre chanter et danser dans son salon. Mais qui est donc l’homme, internationalement connu, qui donne son nom au vélodrome de Toulon? Un enfant prodige du siècle dernier. Orphelin de bonnes heures, ce passionné, né dans le quartier du Pont-du-las, que l’on souhaitait empêcher de chanter s’est construit sur scène envers et contre tous. En 1886, il connait son premier grand succès avec « La Paimpolaise » mais sa carrière décolle vraiment en 1902 avec la chanson « Viens Poupoule ». Son succès est phénoménale, il se produit dans toute la France et même au-delà. Celui qui confie sans ses mémoires avoir créé près d’un demi millier de chansons, rachète en 1910 le « Concert Parisien » pour en faire « Le Concert Mayol ». Il aide à lancer la carrière de Valentin Sardou (père de Fernand et grand-p!re de Michel Sardou), Maurice Chevalier, Raimu (…). Quand éclate la première guerre mondiale, il s’enquiert à relever le moral des troupes avec des visites et des représentations. Dans sa villa, il recueille même des convalescents. Généreux jusqu’au bout, il offre aux Toulonnais un stade qui porte encore son nom. Après une vie de paillettes mais le coeur restait populaire, il s’éteint en 1941 dans sa ville de naissance.

Un ciné-guinguette pour Mayol au six n’étoiles

La soirée promet d’être à la fois élégante, nichée dans le passée, en plein dans les années de « La Belle époque » et en même temps renversante avec un groupe de musique venue faire vibrer les spectateurs. Dimanche 29 janvier, au Six n’étoiles, les arts vont se répondre pour faire renaître le temps d’une soirée, notre vedette toulonnaise internationale.

Ce mélange des genres ne doit rien au hasard. Il est le fruit d’un labeur, celui de Luc Benito, réalisateur du film « Felix et Moi ». Pour conclure son « Road Movie » qui nous entraine sur les traces du chanteur célèbre, l’homme avait un groupe en tête : Le Guinguette Hot Club. Il souhaitait que ces musiciens issus de la même ville que son personnage puissent composer la musique de générique de fin. Julien Ripoll, membre du collectif explique : « Nous avons été touchés par l’aspect patrimonial du sujet, ce qui nous intéressait, c’était le fait que le chanteur soit Toulonnais et que l’on puisse explorer un large répertoire de la chanson française. Dans un second temps, c’est vraiment le côté artistique qui nous a rattrapé, les textes plus que la musique. Nous avons fait en sorte de nous approprier le répertoire, et au lieu d’une musique, c’est un album entier que nous avons réalisé. » Ce qui a permis également aux artistes de se rendre compte de ce qu’il reste de Mayol dans la région. « Certaines mélodies sont inscrites dans l’inconscient collectif. On lance un son, une parole, et la foule se met à danser et chanter  dans les bars. » À découvrir !

La jeunesse découvre une vedette du siècle dernier

« Qui a déjà entendu parler de Félix Mayol ? » Sur plus d’une soixantaine d’élèves présents dans la salle, une poignée d’entre eux seulement lève la main. Un rugbyman, un écrivain, un chansonnier …  rares sont ceux qui tombent juste. Les lumières s’éteignent et les élèves partent à la découverte d’un enfant de fin de siècle, avant la première guerre mondiale. Sur grand écran, ils vivent les péripéties d’une vie, dansent sur des airs de cabarets, et applaudissent à tout rompre une fois le générique de fin déroulé.

Dans la salle, le réalisateur a profité de la pénombre pour se glisser parmi le public, il veut « ressentir l’ambiance ». Luc Benito prend place sur le devant de la scène et tout de suite la parole se libère. Les élèves ont entre 13 et 14 ans et font partie de la section patrimoine du collège Font de Fillol. Chaque année, ils étudient, en plus du passée, la question de la transmission, ce qui les rend peut-être un plus aguerris que la moyenne. Ils veulent savoir tout de suite : « Comment peut-on se procurer des archives ? », « Combien coûte la fabrication d’un documentaire ? », « Pour les reconstitutions, comment avez-vous trouvé les costumes? ». Petit à petit, la pudeur s’envole et les questions deviennent plus intimes. « Si Felix Mayol était homosexuel, pourquoi était-il toujours accompagné d’une femme sur les vidéos d’archives? » « Est-ce qu’il a fini par être accepté par sa famille? » Pendant une heure et demi, le réalisateur va essayé d’offrir le plus de réponses possible.

Les archives s’achètent. Il le sait bien, puisque contrairement à ce qu’il est coutume de faire, il n’est pas passé par un producteur pour créer le long métrage. Il a utilisé ses fonds personnels soit 55 000€ pour répondre à la seconde question.

« Mais en moyenne, pour un petit documentaire, il faut débourser 400 000€. J’ai fait des choix pour que le film puisse aboutir, mais j’ai payé tout le monde. Je n’ai accepté aucun bénévolat. » Pour les costumes, l’homme s’est appuyé sur des associations. « Des passionnés sont venus jusque du Vaucluse et des Hautes Alpes pour le jour de tournage au théâtre liberté. C’est pour cette raison que la réalisation d’un tel projet prend autant de temps. Trois à quatre ans pour concevoir la chose et trois semaines seulement pour tourner. » Quand à Felix Mayol, il a emporté avec lui bien des secrets malgré ses mémoires composées. « Etait-il vraiment homosexuel ou était-ce des rumeurs dû à ses manières ? Sur scène, il jouait un rôle, mimait souvent les dames. La question reste ouverte mais il semble que la chose soit avérée. La femme qui l’accompagnait dans la vidéo est une autre artiste. » Pour sa famille, « disons que le succès à certainement dû arranger les choses. »

« Mayol a encore des choses à nous apprendre »

Luc Benito n’est pas un réalisateur comme les autres, et pour cause. Avant la sortie de « Felix et Moi », il ne l’était pas du tout. C’est en découvrant les mémoires de l’interprète de « Viens Poupoule » qu’un lien se créé, inexplicablement, avec son aîné de plus d’un siècle. Il se met alors en quête d’archives et de reliques. Une idée née dans son esprit, il va créer un film.

« Je ne savais pas ce que je voulais faire, prévient l’homme, j’avais simplement une idée de ce que je ne voulais pas. Il ne fallait pas que ce soit un documentaire « Wikipédia » comme on dit dans le jargon, avec une date de naissance et de mort. Pour un personnage oublié, il fallait impérativement créer du lien, faire en sorte que le spectateur s’identifie. J’ai donc monté cela comme un road movie. J’embarque les gens avec moi. On suit les traces de celui qui s’est effacé de nos mémoires. » 

S’il ne doute pas, une fois la graine germée dans son esprit, il souhaite faire les choses comme il faut. Il multiplie donc les formations techniques et les résidences pour apprendre à écrire un récit, monter un film. Reste le problème de l’argent. Sans producteur, comment financer ?

Soit, il puisera dans ses deniers personnels. « Felix Mayol s’est imposé à moi. Je crois qu’on l’a oublié et qu’on eu tord. Il a encore des choses à dire sur nous, sur notre société. Quand j’ai pesé le pour et le contre, je me suis dis, si je ne le fait pas maintenant … qui le fera ? » Comme « certain s’achète un SUV », lui s’offre, entre autres, les services d’une poignée d’acteurs dont Charles Berling et François Morel. Un cadeau à la postérité. Le film est entrainant, une troupe de chanteurs toulonnais vient ponctuer le voyage littéraire avec des textes et des mélodies de l’artiste revisités. On s’attendrit, on rit, on découvre et on s’amuse. « On dépoussière le genre du documentaire » fera remarquer la directrice de cinéma qui le reçoit en ce jour. Pari réussi, à découvrir.

spot_img

Nos derniers articles

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_img
spot_img

Une grande soirée au six n’étoiles pour aller à la rencontre de Felix Mayol

Qui était Félix Mayol ? 

On dit qu’Edith Piaf s’était inspirée de ses mimiques pour façonner les siennes avant de monter sur scène. Charlie Chaplin, à peine débarqué à Paris confiait à un journaliste son envie d’aller assister à une représentation du chanteur. Marcel Proust, lui même, raconta à un ami qu’il pourrait donner beaucoup d’argent pour voir l’artiste à la houpette célèbre chanter et danser dans son salon. Mais qui est donc l’homme, internationalement connu, qui donne son nom au vélodrome de Toulon? Un enfant prodige du siècle dernier. Orphelin de bonnes heures, ce passionné, né dans le quartier du Pont-du-las, que l’on souhaitait empêcher de chanter s’est construit sur scène envers et contre tous. En 1886, il connait son premier grand succès avec « La Paimpolaise » mais sa carrière décolle vraiment en 1902 avec la chanson « Viens Poupoule ». Son succès est phénoménale, il se produit dans toute la France et même au-delà. Celui qui confie sans ses mémoires avoir créé près d’un demi millier de chansons, rachète en 1910 le « Concert Parisien » pour en faire « Le Concert Mayol ». Il aide à lancer la carrière de Valentin Sardou (père de Fernand et grand-p!re de Michel Sardou), Maurice Chevalier, Raimu (…). Quand éclate la première guerre mondiale, il s’enquiert à relever le moral des troupes avec des visites et des représentations. Dans sa villa, il recueille même des convalescents. Généreux jusqu’au bout, il offre aux Toulonnais un stade qui porte encore son nom. Après une vie de paillettes mais le coeur restait populaire, il s’éteint en 1941 dans sa ville de naissance.

Un ciné-guinguette pour Mayol au six n’étoiles

La soirée promet d’être à la fois élégante, nichée dans le passée, en plein dans les années de « La Belle époque » et en même temps renversante avec un groupe de musique venue faire vibrer les spectateurs. Dimanche 29 janvier, au Six n’étoiles, les arts vont se répondre pour faire renaître le temps d’une soirée, notre vedette toulonnaise internationale.

Ce mélange des genres ne doit rien au hasard. Il est le fruit d’un labeur, celui de Luc Benito, réalisateur du film « Felix et Moi ». Pour conclure son « Road Movie » qui nous entraine sur les traces du chanteur célèbre, l’homme avait un groupe en tête : Le Guinguette Hot Club. Il souhaitait que ces musiciens issus de la même ville que son personnage puissent composer la musique de générique de fin. Julien Ripoll, membre du collectif explique : « Nous avons été touchés par l’aspect patrimonial du sujet, ce qui nous intéressait, c’était le fait que le chanteur soit Toulonnais et que l’on puisse explorer un large répertoire de la chanson française. Dans un second temps, c’est vraiment le côté artistique qui nous a rattrapé, les textes plus que la musique. Nous avons fait en sorte de nous approprier le répertoire, et au lieu d’une musique, c’est un album entier que nous avons réalisé. » Ce qui a permis également aux artistes de se rendre compte de ce qu’il reste de Mayol dans la région. « Certaines mélodies sont inscrites dans l’inconscient collectif. On lance un son, une parole, et la foule se met à danser et chanter  dans les bars. » À découvrir !

La jeunesse découvre une vedette du siècle dernier

« Qui a déjà entendu parler de Félix Mayol ? » Sur plus d’une soixantaine d’élèves présents dans la salle, une poignée d’entre eux seulement lève la main. Un rugbyman, un écrivain, un chansonnier …  rares sont ceux qui tombent juste. Les lumières s’éteignent et les élèves partent à la découverte d’un enfant de fin de siècle, avant la première guerre mondiale. Sur grand écran, ils vivent les péripéties d’une vie, dansent sur des airs de cabarets, et applaudissent à tout rompre une fois le générique de fin déroulé.

Dans la salle, le réalisateur a profité de la pénombre pour se glisser parmi le public, il veut « ressentir l’ambiance ». Luc Benito prend place sur le devant de la scène et tout de suite la parole se libère. Les élèves ont entre 13 et 14 ans et font partie de la section patrimoine du collège Font de Fillol. Chaque année, ils étudient, en plus du passée, la question de la transmission, ce qui les rend peut-être un plus aguerris que la moyenne. Ils veulent savoir tout de suite : « Comment peut-on se procurer des archives ? », « Combien coûte la fabrication d’un documentaire ? », « Pour les reconstitutions, comment avez-vous trouvé les costumes? ». Petit à petit, la pudeur s’envole et les questions deviennent plus intimes. « Si Felix Mayol était homosexuel, pourquoi était-il toujours accompagné d’une femme sur les vidéos d’archives? » « Est-ce qu’il a fini par être accepté par sa famille? » Pendant une heure et demi, le réalisateur va essayé d’offrir le plus de réponses possible.

Les archives s’achètent. Il le sait bien, puisque contrairement à ce qu’il est coutume de faire, il n’est pas passé par un producteur pour créer le long métrage. Il a utilisé ses fonds personnels soit 55 000€ pour répondre à la seconde question.

« Mais en moyenne, pour un petit documentaire, il faut débourser 400 000€. J’ai fait des choix pour que le film puisse aboutir, mais j’ai payé tout le monde. Je n’ai accepté aucun bénévolat. » Pour les costumes, l’homme s’est appuyé sur des associations. « Des passionnés sont venus jusque du Vaucluse et des Hautes Alpes pour le jour de tournage au théâtre liberté. C’est pour cette raison que la réalisation d’un tel projet prend autant de temps. Trois à quatre ans pour concevoir la chose et trois semaines seulement pour tourner. » Quand à Felix Mayol, il a emporté avec lui bien des secrets malgré ses mémoires composées. « Etait-il vraiment homosexuel ou était-ce des rumeurs dû à ses manières ? Sur scène, il jouait un rôle, mimait souvent les dames. La question reste ouverte mais il semble que la chose soit avérée. La femme qui l’accompagnait dans la vidéo est une autre artiste. » Pour sa famille, « disons que le succès à certainement dû arranger les choses. »

« Mayol a encore des choses à nous apprendre »

Luc Benito n’est pas un réalisateur comme les autres, et pour cause. Avant la sortie de « Felix et Moi », il ne l’était pas du tout. C’est en découvrant les mémoires de l’interprète de « Viens Poupoule » qu’un lien se créé, inexplicablement, avec son aîné de plus d’un siècle. Il se met alors en quête d’archives et de reliques. Une idée née dans son esprit, il va créer un film.

« Je ne savais pas ce que je voulais faire, prévient l’homme, j’avais simplement une idée de ce que je ne voulais pas. Il ne fallait pas que ce soit un documentaire « Wikipédia » comme on dit dans le jargon, avec une date de naissance et de mort. Pour un personnage oublié, il fallait impérativement créer du lien, faire en sorte que le spectateur s’identifie. J’ai donc monté cela comme un road movie. J’embarque les gens avec moi. On suit les traces de celui qui s’est effacé de nos mémoires. » 

S’il ne doute pas, une fois la graine germée dans son esprit, il souhaite faire les choses comme il faut. Il multiplie donc les formations techniques et les résidences pour apprendre à écrire un récit, monter un film. Reste le problème de l’argent. Sans producteur, comment financer ?

Soit, il puisera dans ses deniers personnels. « Felix Mayol s’est imposé à moi. Je crois qu’on l’a oublié et qu’on eu tord. Il a encore des choses à dire sur nous, sur notre société. Quand j’ai pesé le pour et le contre, je me suis dis, si je ne le fait pas maintenant … qui le fera ? » Comme « certain s’achète un SUV », lui s’offre, entre autres, les services d’une poignée d’acteurs dont Charles Berling et François Morel. Un cadeau à la postérité. Le film est entrainant, une troupe de chanteurs toulonnais vient ponctuer le voyage littéraire avec des textes et des mélodies de l’artiste revisités. On s’attendrit, on rit, on découvre et on s’amuse. « On dépoussière le genre du documentaire » fera remarquer la directrice de cinéma qui le reçoit en ce jour. Pari réussi, à découvrir.

spot_img

Nos derniers articles

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_img
spot_img

Vous aimez nos articles ?


Abonnez-vous à notre newsletter !